Ci-gît cette grande Éminence

Qui fut l’auteur des guerres en France,

Ce grand Armand de Richelieu

Qui se faisait craindre en tout lieu,

Qui d’évêque fut cardinal

Et à tous grands seigneurs fatal,

Celui qui le Havre fit faire,

Qui Montmorency fit défaire,

Qui la Reine-mère chassa,

Qui Bellegarde exila1 ,

Celui quit fit Soissons périr,

Celui qui fit de Thou mourir

Et qui, par maxime d’État

Fit exécuter d’Effiat,

Celui qui se fit un palais

Et pour législateur Rabelais,

Celui qui a cassé le Parlement,

Fait emprisonner Puislaurent,

Qui fit le maréchal de Guiche

Et qui mit le duc Charles en friche,

Celui qui avait trente pages

Et fit à Bassompierre outrage,

Celui qui par une surprise

Effaça les armes de Guise,

Celui qui fit la subsistance

Pour satisfaire à sa dépense,

Celui qui fit le sol pour livre

Pour ses espions faire vivre,

Qui a pillé pendant vingt ans

Pour enrichir tous ses parents,

Celui qui voulait que Gaston

Prit pour femme la d’Aiguillon,

Celui qui fit le chancelier

Et surintendant Bouthillier,

Celui qui revint de Narbonne

Pour être enterré en Sorbonne,

Celui qui commandait au foudre

Est maintenant réduit en poudre,

Et qui, malgré tout son pouvoir,

A payé le dernier devoir.

C’en est fait, il est au néant.

Remercions le Tout-Puissant

Et prions Dieu pour Mazarin.

Qu’il ne nous soit point inhumain2 .

• 1Qui Bellegarde exila. / Celui qui faisait tout mouvoir / Et qui avait tout le pouvoir, / Lui qui, par maxime d’État/  Fit exécuter d’Effiat, / Qui a choqué le Parlement, / Fit impoisonner Puy-Laurent / Qui fit le maréchal de Guiche / Et qui mit le duc Charle en friche, / Celui qui avait trente pages / Et qui mit Bassompierre en cage (Tableau de la vie de Richelieu)
• 2Voir *0147