Sans titre
Sonnet
J’ai vécu sans pareil, j’ai régné sans égal,
On admirait partout ma vertu et mes vices,
Mes desseins comparés avec mes services
Font douter si j’étais souverain ou vassal.
Quoique j’aie entrepris, soit du bien, soit du mal
J’ai toujours rencontré de fidèles complices
Et le Ciel et l’Enfer m’ont été si propices
Qu’on ne sait qui des deux m’a nommé cardinal.
J’ai fait régner le fils, j’ai fait mourir la mère
Et si j’eusse vécu, j’eusse perdu le frère,
Voulant seul de l’État gouverner le timon1 .
Qui m’a voulu choquer a senti ma puissance
Pour dompter l’Espagnol, j’ai ruiné la France
Jugez si j’en étais ou l’ange ou le démon2 .
Lyon BM, MS 756, f°129 - Arsenal 3128, f°41r - Nouveau Siècle, t.I, p.23 - Nouvelles de l’autre monde, p.26-27 - Tableau de la vie de Richelieu, p.73 - BHVP, MS 555, f°22v-23r