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La mort de Louis XIV

        La mort de Louis XIV

Cet homme qu’une indigne et basse flatterie

Sur un piédestal criminel

Expose à tous les yeux comme étant immortel,

Et pour qui, sans la peur d’un trait de raillerie,

La courtisane idolâtrie

Aurait fait dresser un autel.

Cet homme, dis-je, insatiable

Vient de mourir insolvable,

Et son peuple affligé, indigent, malheureux,

N’a de tous ses exploits qu’un souvenir affreux.

Ah ! si vingt ans plus tôt la Parque

L’eût mis du noir Caron dans la plaintive barque,

Nous en gémirions moins, et si par son ciseau

Elle eût coupé le fil de sa trop longue vie,

Alors lui-même, sans envie,

Jouirait parmi nous d’un glorieux tombeau.

Mais en disciple trop crédule

On le vit jusqu’à son déclin

Respecter d’Ariston l’hypocrite férule,

Et tel que le grand Constantin

Qui, vainqueur de l’arianisme,

D’un Eusèbe arien donna dans le sophisme,

Cet homme qui dompta les enfants de Calvin,

Mourut, par le même destin,

Entre les bras du molinisme ;

Enfin si de la mort par un indigne effroi,

Ce prince pour Tellier eut une entière foi,

Cet homme si grand par lui-même

Se laissa gouverner par ce fin conducteur,

Et soumit son pouvoir suprême

Aux intérêts cachés d’un si fier séducteur1 .

  • 1Voir $0006

Numéro
1058


Année
1715


Personnalité
Louis XIV (1638-1715), roi de France


Nombre de vers
31 vers

Métrique
Mêlée

Finalité
Critique


Références

Raunié, I,27-28