Sans titre
Ci-gît un tyran implacable
Qui n’eût pardonné à la mort
Si ce vainqueur impitoyable
N’eût été maître de son sort.
Pour monter jusqu’au premier rang
Il répandit ce noble sang,
Issu de royale lignée,
Et, mourant, n’eut d’autre dessein
Que de montrer un cœur d’athée
Logé dans le corps d’un chrétien.
Passant, si malgré ses offenses,
Malgré toute sa cruauté
Qui a versé le sang de France,
Tu en es touché de pitié,
Prie Dieu seulement pour son corps.
Que, sortant de ces noirs cachots
Il n’aille en la cave infernale
Rejoindre son funeste esprit
Qui croit son arrivée fatale
Dans cette épouvantable nuit.
Mais prie plutôt pour sa patrie,
Que ce corps tout pourri de vers
Dont la France est toute pourrie,
Joignent son esprit aux enfers
De peur que cet espoir cruel
Donnant encore un coup mortel
N’achève enfin tous de nous perdre
Et que ceux qui manient l’État
Ne fassent à son exemple naître
Au lieu de justice un sabbat1 .
- 1Voir *0238
Trésor des épitaphes, p.10 - BHVP MS 555, f°8r-9v